Extrait de « La vallée du Rhône » par le Docteur Vouga :
Saillon
Mon collègue espérait rencontrer à Saillon un de ses amis, M. Barman, dont la maison occupe, hors du village, le milieu d’un vignoble réputé, mais malheureusement elle était inhabitée.En passant au dessous, je constatai le laisser-aller avec lequel était cultivé le vignoble en question. Les ceps couverts de grappes vertes de raisin de malvoisie n’étaient pas même soutenus par des échalas et rampaient sur le sol ; on m’assura que dans des coteaux exposés aussi directement au sud, c’était le seul moyen de garantir le sol contre la sécheresse et d’obtenir une maturation convenable.
La Salence
Ailleurs, près de Sion, la culture de la vigne est plus perfectionnée et se fait à la vaudoise, mais on est forcé d’irriguer les vignes. Les vins appelés malvoisie douce et malvoisie amère sont comptés parmi les plus réputés du Valais, et lorsqu’ils sont bien traités, ils sont décidément d’un goût exquis et d’une violence méridionale.
Tout en devisant nous arrivâmes bientôt près d’un ruisseau, en face du petit village de Produit, perché au milieu des champs de blé déjà jaunes sur une croupe avancée ; puis après avoir remonté pendant près d’un quart d’heure une espèce de large vallon couvert de prairies et d’arbres fruitiers, nous nous trouvâmes en face d’une fissure de rocher, au fond de laquelle la Salence tombe en cascatelles.
C’est précisément de ce rocher que s’échappe à quelques pas de cette espèce de grotte la source minérale de Saillon, qu’une petite digue eu maçonnerie force à former, dès sa sortie, une piscine de quelques mètres carrés et de près de quatre-vingts centimètres de profondeur, ou les gens de Saillon viennent, été et hiver, prendre des bains dans une eau de température constante. Manquant de thermomètre, je ne pus l’apprécier, mais le bain que j’y pris, tout mouillé de sueur, malgré les conseils de mon collègue, me fit l’impression d’une eau à 20 degrés Réaumur, légèrement plus chaude que celle de notre lac au milieu de juillet. Une grenouille qui nageait près de moi paraissait s’y trouver aussi fort à l’aise. La source est très-abondante et sort avec force d’un trou dans lequel on peut enfoncer le bras; l’eau est limpide, d’une saveur à peine appréciable, et ne paraitpas déposer de fer dans la piscine, quoiqu’elle passe pour en contenir. Je ne crois pas que l’analyse de cette eau ait été faite, mais elle est employée en boisson aux bains de Saxon, et avec un certain succès. L’endroit est joli, parfaitement abrité au nord par un coteau couvert de vignes dominé par des rochers et exposé en plein midi. Ce serait une localité parfaitement convenable comme séjour d’hiver pour les phthisiques ou les convalescents auxquels l’emploi des ferrugineux serait à recommander ; quelques travaux et plantations en rendraient les environs charmants. J’ai toujours conservé l’idée d’y retourner pour en rapporter de l’eau et en prendre la température exacte, peut- être quelque société trouvera-t-elle tôt ou tard avantageux d’y créer un établissement dans le genre de celui auquel je viens de faire allusion.
C’est l’opinion de M. Claivaz, qui ne croit pas qu’il fût bien difficile d’obtenir de la commune de Saillon la concession de cette source et des terrains nécessaires à la création d’un établissement destiné à l’utiliser.