Ce tableau a été l’une des têtes d’affiche de l’exposition du centième anniversaire de la mort de Courbet de 1977 à Paris. C’est une toile réapparue lors de la rétrospective au Grand Palais de Paris.
Comme elle n’avait aucun nom, Hélène Toussaint la baptisa sans certitude, le « Paysage fantastique aux roches anthropomorphiques« . Elle l’étudia et y découvrit pas moins de onze monstres dissimulés dans le tableau de Courbet.
Toutes sortes d’hypothèses ont été émises sur ce tableau énigmatique. Bien d’historiens et de chercheurs se sont laissés entraîner dans cette brèche, ne sachant pas qu’un jour la réalité allait les rattraper. En effet, cette toile a été peinte par Courbet dans un site qui existe vraiment en Suisse. Elle ne sort pas de l’imagination de l’artiste d’Ornans.
C’est précisément à Saillon, au coeur du Valais que Courbet a peint la Caverne des Géants en 1873.
Hélène Toussaint, l’auteure de la rétrospective Courbet en 1977, trouva qu’il était difficile de dater ce Paysage Fantastique. Elle suggéra qu’il pût être assez postérieur à celle du Gour de Conche, datée de 1864. Dans ce dernier cas, elle a raison puisque cette toile a été peinte en 1873, 9 ans après le Gour de Conche.
Elle nota également que ces deux tableaux, Le Gour de Conche et Le Paysage fantastique aux roches anthropomorphiques, étaient des paysages mystificateurs dont les roches et les cascades affectaient les formes clandestines à têtes humaines ou animales. Le Gour de Conche en était un exemple.
Le Gour de Conche / Musée des Beaux-Arts et d’Archéologie, Besançon, France
Elle y distingua nombre de ces figurations anthropomorphes qui viennent expliquer un Paysage fantastique qui révèle un Courbet inconnu tenté par la fantasmagorie et l’anamorphose. Par contre, aucun mot sur les 2 personnages présents sur le tableau.
Toussaint conclut en constatant que Courbet ne connaît pas d’équivalent en son époque. Il s’inscrit dans le mouvement réaliste, mais son objectivité est toujours enrichie d’un appel constant à l’imaginaire. Pourtant sa fable est bien éloignée de celle des romantiques. Au contraire de ceux qui interprètent directement les thèmes puisés dans la légende, Courbet par son lyrisme, sa culture, par des moyens ésotériques et inavoués sublime la vérité quotidienne.
On est tout proche d’Arcimboldo.
On plonge ici avec Hélène Toussaint dans le monde de George Lucas dans la science-fiction et si l’exposition Courbet avait eu lieu deux ans plus tard, en 1979, on serait à coup sûr parti dans le monde de Hans Ruedi Giger et celui de Ridley Scott avec Alien.
Pour couronner le tout, la cerise sur le gâteau intergalactique et en plus sous l’oeil approbateur de Michel Laclotte, conservateur en chef du département des peintures du musée du Louvre, la spécialiste des peintres du XIXème Hélène Toussaint, s’interrogea qu’il fallait réviser des jugements arbitrairement établis et le citer différemment comme, il a bientôt un demi-siècle, on a rendu sa véritable place en s’avisant que ce narrateur de la vérité cruelle est également le poète de l’irréel.